Autisme, la recherche avance
J’ai trouvé un article sur les recherches scientifiques menées pour mieux comprendre l’autisme. Pendant longtemps, les causes de ce trouble du comportement ont été complètement floues. Dans les années 80, l’autisme était à la mode et était le “diagnostic-poubelle” réservé à la plupart des troubles du comportement. Un enfant était plus turbulent que la normale, paf, il était diagnostiqué autiste. Il avait du mal à dessiner un bonhomme avant d’avoir 6 ans (les fameux tests d’aptitude à l’apprentissage du langage écrit entre 5 et 6 ans), paf, autiste. Il ne connaissait pas les couleurs, pareil (maintenant on sait que la méconnaissance des couleurs est dans certains cas annonciatrice d’une dyslexie, c’est une observation bien utile dans les dépistages précoces). Quand je vois le nombre d’enfants de maternelle que j’ai dû rééduquer pendant mes stages, beaucoup auraient été diagnostiqués autistes!
Quant aux causes, elles ont longtemps été mises sur le dos des parents, faute de mieux. Des parents alcooliques, fumeurs, ou simplement des couples qui s’engueulaient beaucoup avaient soit-disant plus de risques de mettre au monde un enfant autiste. Les thérapeutes faisaient donc culpabiliser les parents, ce qui n’arrangeait rien dans le processus de “guérison” de leur enfant.
En plus de tout cela, l’autisme en lui-même étant extrêmement diversifié, il a fallu un temps monstrueux pour en fixer les limites, pour y trouver un fil conducteur, une façon de dire de tel enfant qu’il est autiste, et d’un autre ayant aussi des troubles envahissants du comportement qu’il ne l’est pas (mais qu’il est Rett, Asperger ou désintégratif par exemple). Il a fallu un temps fou aussi pour trouver des activités qui permettent à ces enfants “différents” de pouvoir tenir dans une classe d’enfants “normaux” car à l’époque, les institutions spécialisées n’existaient pas encore.
Depuis un moment, on sait que la cause de l’autisme serait d’origine génétique. Comme la trisomie 21 est due à une mutation sur le chromosome 21, l’autisme pourrait être dû à des mutations de gènes sur les chromosomes 2, 3, 7, 15 et X. Bien sûr toute théorie génétique doit tenir compte des facteurs environnementaux, les recherches sont donc sur la bonne voie mais encore loin d’être abouties.
L’article que j’ai trouvé aujourd’hui explique que la Fondation Autisme Agir et Vaincre vient de mettre sur pied la première banque génétique française. Il s’agit d’une banque de données cliniques et génétiques que fourniront les parents d’enfants ayant des troubles envahissants du comportement. Cette banque sera mise à la disposition des équipes de recherches. Le gros progrès, à court terme, serait de trouver les moyens de faire un diagnotic précoce d’autisme. Le gynécologue prélèverait les données génétiques du foetus et les ferait analyser… que de progrès, j’en suis toute retournée!!
Ce qui me chagrinne, c’est que si les causes sont massivement génétiques, et nettement moins dues aux facteurs environnementaux, cela ne laisse pas beaucoup de place à l’espoir des thérapeutes de voir leurs patients adultes réellement progresser. Comment guérit-on une maladie génétique ? Le mieux reste donc de leur donner les outils pour surmonter leurs difficultés, de créer pour eux un environnement stable et répétitif et de les soutenir quand ils ont des crises d’automutilation.
Je regardais F. tout à l’heure. Il est au centre depuis 2 ans. Au début, il cassait tout, il se cassait même les poignets en frappant dans les murs et dans les portes. Il ne savait rien exprimer. Imaginez que vous, à l’âge que vous avez maintenant (mes patients sont des adultes) avez des mots dans la gorge, des envies de parler, de demander, d’aller vers les gens… et qu’en même temps, quelque chose d’incompréhensible et d’irrésistible vous en empêche. C’est pas de la frustration de fillette! Et ça ne doit pas être évident de réussir à rester calme quand on ressent des choses et leur contraire.
F. a fait beaucoup de progrès mais reste toujours sensible aux changements. Le jour où je suis arrivée au centre, il m’a presque étranglée. Du haut de son mètre 80, il a tendu la main vers moi, a attrapé mon col et m’a plaqué contre un mur. Cinglé, va!
Il a toujours ses automutilations. La principale est qu’il avale de l’air, se fait gonfler le ventre et se crée des fécalums (gros amas de matières fécales très dures). C’est super douloureux, surtout quand ça doit sortir! La rééducation avec lui se fait en relation étroite avec le kiné. Lui les massages du ventre et moi la respiration. Comme F. refuse tout travail individuel, il faut profiter des temps de loisirs pour jouer à des jeux de bouche qui visent à lui faire prendre du plaisir à sentir l’air passer vers l’extérieur. Genre mettre ses mains sur ses oreilles et faire le cheval avec la bouche, prolonger des sons, laisser sortir un son et le moduler en jouant avec les lèvres… C’est un peu les jeux de bouches que font les enfants avant l’apparition du langage articulé.
Comme il ne savait pas s’exprimer (demander pour aller aux toilettes, dire qu’il ne voulait pas de jus d’orange mais plutot du jus de pomme, etc.), il frappait. Actuellement, il sait faire des gestes pour s’exprimer…
Quand quelque chose l’ennuie, F. ferme les yeux. C’est sa façon de se mettre dans sa bulle, de se dire “Bon, allez, relax, on se calme, on respire, on ignore, je vis avec des fous, c’est pas de leur faute s’ils sont cinglés, on ne frappe personne, on ne tape pas dans le mur, relax ça va passer”. Franchement je l’admire. Moi j’explose facilement quand ça ne va pas. S’il pouvait m’apprendre à prendre de la distance comme il le fait, ça m’aiderait dans pas mal de situations!
1 reply on “Bonjour tout le monde !”